métavers

C’est le vendredi 22 octobre 2021 que débutait le Metaverse Festival, commandité par la plateforme Kraken. Sous les traits de l’avatar Waner404, une visite de Decentraland permettait de se familiariser avec un décor lunaire où se côtoyaient pyramides Aztèques au look futuriste, pistes de danse regroupant des avatars virtuels tous différents les uns des autres, et concerts de Deadmau5 ou de Paris Hilton. C’est en croisant un alien sortant d’une soucoupe volante, des activistes numériques pro-NFT ou encore un reptile avec son gin-tonic que l’on ne peut conclure qu’une chose : le Métavers annoncé approche à grands pas.

1- LE MÉTAVERS, UNE DÉFINITION ÉVOLUTIVE
Il est bien évidemment essentiel de se demander ce qu’est exactement le Métavers. C’est à partir de 1992 que le néologisme anglais « Metaverse »

(ou métavers en français) apparaît pour la première fois dans le livre de Neal Stephenson, « Snow Crash », comme un terme portemanteau fusionnant les termes « meta » et « universe ». Ce mot venait décrire un univers digital où des humains, à travers des avatars les représentant, interagissent entre eux et avec cet espace 3D présenté, dans ce livre, comme le successeur de l’Internet. On ne peut définir le Métavers sans englober les diverses technologies et fonctionnalités qu’il abrite. Il est ainsi courant aujourd’hui d’associer à un tel espace des fonctionnalités multiples comme un espace social, un espace de jeu en ligne, l’inclusion de fonctions économiques, voire même, l’inclusion de fonctionnalités de réalité augmentée (AR) ou de réalité virtuelle (VR) afin de permettre de faire évoluer l’interactivité des personnes avec cet espace pour se libérer des contraintes matérielles usuelles comme le clavier et la souris.

La création d’un Métavers est un objectif bien concret pour de nombreux acteurs qui cherchent notamment à standardiser ce développement, ou du moins à proposer des outils pour participer à cette entreprise. À cet égard, plusieurs initiatives ont été mises en œuvre dans la dernière année pour aller de l’avant vers la création d’un Métavers comme la collecte de fonds d’Epic Games pour la transformation du jeu Fortnite en Métavers1, le lancement de Microsoft Mesh2 comme logiciel de réalité mixte pour l’intégration d’un univers virtuel dans notre univers réel ou, la création par la Corée du Sud3 d’une alliance nationale de sociétés afin de définir et créer une plateforme nationale de Métavers pour les acteurs souhaitant offrir des services virtuels. Plus récemment, c’est bien évidemment le changement de nom de “Facebook” vers “Meta”4 ainsi que l’annonce officielle faite par Mark Zuckerberg de leur engagement à développer un écosystème Métavers qui a rallumé l’intérêt pour cette technologie et sa mise en œuvre.

2 – CHAÎNE DE BLOC & MÉTAVERS
Si le Métavers devient aujourd’hui une réalité de plus en plus concrète, c’est notamment grâce à la technologie de la chaîne de bloc et ses avancées dans les dernières années. En permettant notamment de tokéniser des actifs, c’est-à-dire de pouvoir établir avec autorité l’existence et la titularité d’un bien numérique, la chaîne de bloc a permis de créer une fondation solide et nécessaire pour le développement du Métavers. De manière initiale, à travers les différentes cryptomonnaies, la chaîne de bloc a permis la mise en place d’une vraie économie numérique avec des systèmes de transfert de valeur fonctionnels.

Dans cette mouvance, les jetons non fongibles (Non-fungible tokens ou NFT) ont ainsi gagné en popularité en 2021 en permettant la tokénisation de biens numériques comme des œuvres d’art. Bien évidemment, la chaîne de bloc comme les NFT posent en eux-mêmes un certain nombre d’enjeux juridiques (fiscalité applicable, valorisation fluctuante, régulation possible en matière de valeurs mobilières, droit à la vie privée, etc.), mais comme on peut le voir jusqu’à présent, cela ne fait que s’inscrire dans la longue liste de questionnements juridiques soulevés par le Métavers lui-même.

3 – QUELQUES ENJEUX JURIDIQUES
La question de la titularité de la propriété intellectuelle concernant le Métavers est bien évidemment un enjeu majeur, notamment dans un espace qui cherche à s’appuyer sur la collaboration et les créations de ses utilisateur.trice.s. À cet égard, il sera ainsi important de clairement déterminer les règles applicables en matière de titularité des œuvres. De manière plus spécifique, les titulaires de licences devront également vérifier en amont que les droits qui leur sont accordés dans le cadre de celle-ci permettent l’utilisation dans le Métavers. Sur ce même sujet, les enjeux relatifs à l’utilisation de licences libres pour permettre la création d’outils et de plateformes par les utilisateur.trice.s et pour les utilisateur.trice.s plutôt que de voir l’apparition de solutions propriétaires est aussi un débat important qui viendra façonner ce à quoi le Métavers ressemblera.

Bien évidemment, il faut aussi se demander quels seront les recours possibles dans le cadre du Métavers ainsi que sur les mécanismes qu’il pourrait être nécessaire de mettre en place pour faire respecter les droits des utilisateur.trice.s, qu’ils soient des acteurs de ce Métavers ou des personnes externes à celui-ci dans un Métavers décentralisé et donc sans autorité de contrôle. Sera-t-il possible de se tourner vers un « tribunal du Métavers » ou faudra-t-il espérer recevoir le soutien des tribunaux « du monde réel »?

En conclusion, le Métavers tend à devenir l’Internet 3.0 voire 4.0 en promettant une interconnectivité encore plus globale et ouverte qui permettrait un niveau d’interaction inégalé avec cet espace. Il est cependant encore difficile d’imaginer précisément la forme exacte que celui-ci prendra et c’est donc aux acteurs de cet univers, qu’il s’agisse de sociétés ou de simples personnes de déterminer les principes permettant son bon fonctionnement.

C’est peut-être en laissant les utilisateur.trice.s de cet espace apporter leurs propres solutions à ces questions que l’on sera en mesure de voir apparaître progressivement un Métavers pratique et utile capable de répondre aux promesses faites tout en assurant le respect des droits de chacun.

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  1. A. Webster, « Fortnite’s experimental story is an attempt to create “the entertainment experience of the future” ». The Verge, 18 mars 2021, disponible en ligne (consulté le 1er décembre 2021) : https://www.theverge.com/22338403/fortnite-story-narrative-interview-donald-mustard-epic-games
  2. Microsoft, « Microsoft Mesh », Microsofot, disponible en ligne (consulté le 1er décembre 2021) : https://www.microsoft.com/en-us/mesh
  3. S. Sharwood, « South Korea creates “metaverse alliance” to build an open national VR platform”, The Register, 18 mai 2021, disponible en ligne (consulté le 1er décembre 2021) : https://www.theregister.com/2021/05/18/south_korea_metaverse_alliance/
  4. Meta, « Présentation de Meta : une entreprise de technologies sociales », Meta, 28 octobre 2021, disponible en ligne (consulté le 1er décembre 2021) : https://about.fb.com/fr/news/2021/10/presentation-de-meta-une-entreprise-de-technologies-sociales/

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